L'affaire Klapahouk (retour au sommaire)
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Laffaire de lhôpital psychiatrique: La C.G.T. précise sa position Laffaire du service de lHôpital psychiatrique ne doit pas aboutir à une guerre de communiqués entre les diverses parties, ce qui serait aussi inutile pour linformation du lecteur et nuisible au personnel-soignants et médecins de lhôpital. Par contre des faits précis, une information concrète sont favorablement accueillis par une opinion publique qui est maintenue dans une relative ignorance des problèmes psychiatriques. Le communiqué des délégués C.G.T. de lensemble du personnel soignant de lHôpital psychiatrique apporte à ce propos des précisions intéressantes quant au rôle joué par les infirmiers et surveillants dans leurs rapports avec les malades, les médecins et ladministration. Les délégués C.G.T. veulent, en cela, répondre aux affirmations du docteur Klapahouk dont nous reproduisions des extraits dans le dernier Haute-Marne Dimanche. Il y est dit que le personnel soignant dun service refuse les efforts à faire pour une psychiatrie plus humaine et, par ses éléments rétrogrades, fait collusion avec ladministration pour le maintien des structures asilaires . Les délégués C.G.T. contestent cette image de leur profession et affirment que la majorité du personnel soignant nenvisage pas dexercer essentiellement son rôle dans la piqûre-punition, la camisole de force, le calmant ou le passage à tabac . Pour ce qui concerne les rapports personnel soignant - administration, le communiqué apporte un certain nombre de précisions : Depuis longtemps les organisations syndicales ont rappelé à ladministration lurgence de lamélioration des conditions dexistence des hospitalisés, surtout dans les pavillons anciens. Sur le plan des activités socio-thérapiques, leffort du personnel a porté sur plusieurs points. Les délégués C.G.T. savent que cela nest quun début et reconnaissent que les moyens sont réduits : budget des Clubs limité, personnel trop restreint. La politique de sectorisation doit aussi, pour la C.G.T., être mise en place dans le respect des personnes, de façon humaine, en créant, par exemple, des foyers de post-cure, à lextérieur de lhôpital. En fait, la véritable question nest-elle pas de savoir si lon veut instaurer une politique sanitaire mentale valable, au service et dans le respect du malade, et de demander à lEtat, à la région, au département, sils sont décidés à faire les choix nécessaires, au plan budgétaire, qui en permettront lapplication ? Le communiqué reconnaît le renouveau apporté par les jeunes psychiatres notamment par une prise de conscience dans le personnel soignant et la société, et les efforts à faire par cette société pour ne pas rejeter systématiquement le malade mental à lasile. Mais la C.G.T. pose le problème des relations entre médecin-chef et personnel soignant : Nest-il pas vrai aussi que la meilleure psychiatrie ne peut se faire sans un dialogue permanent, une réllexion et une remise en cause communes et continues du personnel soignant et du médecin-chef ? Cela exclut, au départ, tout mépris réciproque. Cela est possible, puisque cest déjà vécu à lHôpital psychiatrique. Cela suppose aussi une certaine continuité des médecins-chefs. En effet, la valse des médecins-chefs et la succession de leurs politiques différentes, déconcertent les hospitalisés et le personnel soignant, qui vérifient presque annuellement, à leurs dépens, quil y a de multiples pratiques différentes correspondant à de multiples écoles de pensée en psychiatrie. Dans larticle du Monde déjà cité, Georges Daubié donne son point de vue : Sept infirmiers ont refusé de se joindre à la mutinerie . Lun deux, M. Daubié, ancien délégué C.G.T., affirme quavant même son arrivée, en septembre 1972, le docteur Klapahouk avait été jugé indésirable par certains infirmiers, parmi les plus anciens , les plus rétrogrades . Le nouveau médecin-chef, dit M. Daubié, avait une réputation danalyste et de disciple de lEcole freudienne de Lacan. Certains craignaient quil ne poursuive le mouvement de modernisation et de libération entrepris par ses prédécesseurs, déjà critiqués à ce propos. Beaucoup dentre nous ont peur du changement. Nous avons été formés pour être des gardiens, pour distribuer des tranquilisants et non pour aider le malade à retrouver sa place dans la vie. Franchir la barrière qui nous sépare des malades nous inquiète et beaucoup pensent nen être pas capables. Tu crois à la psychiatrie, pas nous, mont dit certains de mes collègues. Etablir le dialogue avec le malade, rompre son isolement, angoissent les infirmiers. Cest linsécurité. Alors on prélère garder ses distances. Et pour M. Daubié cela signifie que lon se réfugie derrière les vieilles méthodes , souvent répressives : labus des neuroleptiques ( la camisole chimique), des électrochocs, les brimades et les punitions : Si tu ne te tiens pas tranquille, je te fais une nouvelle piqûre. Le médecin-chef allait à lencontre de tout cela dans ses prescriptions. Et M. Daubié craint que, parfois, celles-ci naient pas été suivies. Il remarque enfin que le conservatisme du personnel ne pouvait quêtre encouragé par lattitude de la direction et du conseil dadministration. Les rapports des prédécesseurs du docteur Klapahouk tendent à confirmer ses critiques à cet égard. Le docteur Lauff notait ainsi : Mes demandes, si elles nétaient pas rejetées avec acrimonie, restaient sans réponse. La position de réclusion des médecins-chefs est fort appréciée. Le climat de méfiance et de discrédit où on les maintient correspond en gros à létat de ségrégation où sont les malades. La crise actuelle est laboutissement de dix années de conflit larvé, ajoute M. Daubié. Sil a éclaté aujourdhui, cest sans doute que le docteur Klapahouk sest montré moins diplomate que ses prédécesseurs. Choqué par la situation quil subissait, il sest montré plus intransigeant, parfois maladroit. Cest un personnage sans concessions. Invivable... , disent les grévistes en privé. Il semble, en effet, que des questions de personnes soient à lorigine du conflit. Mais si les incompatibilités dhumeur sont réelles, elles nen sont que le détonateur. Selon le docteur Ayme, président du Syndicat des psychiatres, les difficultés rencontrées par le docteur Klapahouk à Saint-Dizier sont également connues par dautres psychiatres. Lévolution actuelle de la psychiatrie est souvent mal comprise des représentants de ladministration notamment. Et les psychiatres ont rarement les moyens de prouver le bien-fondé des nouveaux modes de traitement. Lorsquil sagit de maladie mentale, la société se montre volontiers conservatrice. A Saint-Dizier, le climat est depuis longtemps particu-lièrement malsain.
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Dossier de presse Dans le Monde du 15-11-1973, Francis Cornu présente sous le titre Des infirmiers qui ne croient pas à la psychiatrie, une synthèse du conflit qui opposa le médecin-chef au personnel de son service. Nous ne reproduisons pas cet article et préférons restituer lintégralité des articles de presse locaux qui introduisent mieux, dans leur succession insistante, au vécu du conflit marqué par ses inquiétudes et ses non-dits.
Reprendre la lecture d'André Breton. |
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