Le père de Pascale

Toi mon père, toi que je revois animer ces soirées dansantes, bal. Je te vois installé derrière tout ton matériel (sono) le 1er janvier. Tous ces gens bien habillés, robes de soirée pour les dames, costumes cravates pour les hommes, les enfants qui courent partout. Tu étais habillé tout simple. Nous étions une bande de jeunes environ cinq ou six à partir avant minuit pour nous déguiser. Quand nous sommes revenus, je te vois nous regarder, te demandant qui nous étions. Tu as fini par comprendre, il est vrai que cela était amusant car tout le monde a rigolé.

Je me souviens d'un jour de Mai, c'était un jour ensoleillé. Je te vois préparer la tondeuse à gazon. Ce jour-là il restait encore un bon bout à faire. Malheureusement tu as reçu du monde, mais tu ne pouvais pas finir, alors avec ma soeur j'ai décidé de prendre le relais, pourtant je n'avais jamais touché de tondeuse de ma vie. Ce jour-là, quelle rigolade, car il fallait que je m'occupe de mes filles en même temps. Par un moment, mon père est venu me voir pour savoir si je n'avais pas vu Angélique, finalement on l'a retrouvée dans le tracteur d'un ami. Je me souviens que mon père rigolait, parce que j'avais un peu de mal à retenir la tondeuse. Quand il me remplaça c'était fini. Quand il m'a vue, il m'a demandé pourquoi j'étais rouge au bras. J'avais une allergie au chardon, ça me brûlait.

Ces mains si mates, ces mains qui ont travaillé tant d'années.

Ces mains si fines.

Mes mains si fragiles dans les tiennes si douces au toucher et si râpeuses à la fois.

Ces mains qui ont fait tant de choses.

Ces mains me touchaient les cheveux pour me coiffer.

Ces mains qui me tendaient des bonbons.

Ces mains qui me bordaient le soir.

Ces mains qui tenaient un livre pour lire une histoire.

Ces mains qui me prenaient pour me prendre dans tes bras.

Ces mains qui me débarbouillaient le visage avant l'école.

S'il y a une chose que je ne peux pas oublier, c'est lorsque tu partais au travail, tu ne faisais pas de bruit, tu étais routier, parfois on te voyait le week-end, ou d'autres fois on te voyait au bout de quinze jours.

Tu partais de la maison (Chalvaines) jusqu'à Rinaucourt en voiture, et tu reprenais ton camion ensuite. Ce qui me faisait le plus peur, c'était quand tu faisais tes manoeuvres, il y avait une rivière, lorsque tu avançais j'avais l'impression que nous allions tomber dedans. Même en sortant de cette cour où étaient stationnés les camions.

Le démarrage et les manoeuvres sont plus durs qu'une voiture, on est plus secoué aussi, on se sent plus grand car la cabine est haute. La seule fois je suis allée avec toi, c'était pour aller en Meurthe-et-Moselle, c'est mon lieu de naissance, je devais avoir 11 ou 12 ans, tu m'as emmenée voir mes grands parents qui aujourd'hui sont décédés. Ça a été une surprise pour moi car tu ne m'avais rien dit.

Je me souviens même qu'une fois tu avais besoin du réveil car tu partais au boulot à 3 heures du matin, mais tu as oublié de me le remettre à 4 heures 30 et c'est moi qui suis arrivée en retard au travail, j'avais 16 ans et 10 mois.


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Le père de Viviane.

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