La Montagne de Trebevitch
...que j’ai adorée pendant vingt ans
Trebevitch est une haute montagne de 2500 mètres de hauteur, pleine de verdure, avec des petits lacs bleus entourés de sapins et d’arbres fleurissants dont l’odeur descend sur la ville de Sarajevo, la plus belle ville de Yougoslavie à cause de Trebevitch.
Après les cours à l’université, j’allais dans une bibliothèque de style antique-autrichien avec les grandes fenêtres qui donnaient une belle vue sur la montagne de Trebevitch. Je regardais cette montagne, ça me reposait l’esprit et ça me donnait le courage de réussir dans mes études et d’aimer ce qui est beau. En la regardant je l’aimais beaucoup plus. Je pensais qu’il n’y aurait jamais de guerre pour brûler et détruire cette nature.
J’observais les traces de l’histoire des peuples qui sont déjà passés sur cette belle montagne. De ma table, devant la fenêtre de la bibliothèque, en voyant du sommet jusqu’en bas toutes les civilisations qui sont déjà passées par là, je commençais à imaginer.
Les monuments historiques descendent comme des escaliers jusqu’en bas, en suivant les siècles.
Tout à fait au somment, les plus anciennes civilisations avec leur monument historique. Je voyais le petit monument des Païens qui se trouve tout à fait au sommet, avec des pierres assez primitives.
Après je voyais les monuments des romains avec des pierres et des piliers taillés.
Encore plus bas, des murs qui entourent les tombes des Slaves qui viennent de Russie.
Plus bas les maisons de pierre et de bois qui entourent de grandes cours, c’est l’Empire ottoman, qui vient de Turquie.
Tout à fait au pied de la montagne, ce belles maisons de style germanique, c’est l’Empire autrichien.
Cette bibliothèque de style antique-germanique d’où je regardais le panorama, a justement été faite pour l’Assemblée autrichienne. Elle est séparée seulement par une rivière du mont Trebevitch. C’est la plus belle bibliothèque de Yougoslavie où les trois peuples slaves, de même langue, apprennent ensemble non pas comme des peuples frères, mais comme un seul peuple. Cela donnait le moral de regarder avec l’espoir que cette nature et ce processus historique soient conservés pour les autres générations.
J’avais oublié que le fascisme politique peut créer de nouveau le fascisme religieux pour pouvoir se cacher derrière la religion et obtenir les pouvoirs stratégiques et territoriaux. Il faut tout tuer et tout détruire, c’est la seule façon de tout obtenir, pour les fascistes.
Aujourd’hui c’est arrivé.
Trebevitch, la bibliothèque : il n’y a plus que des ruines. C’est le fruit de la civilisation de notre siècle. Mais elle n’a pas ruiné mes souvenirs.
Les souvenirs dans mon esprit restent intacts parce que je refuse de penser à la réalité actuelle. Sinon je perds les plus beaux souvenirs de là où j’ai passé vingt ans de ma vie.
Je préfère, si je peux, penser qu’il n’y a jamais eu de guerres à Sarajevo, et ma bibliothèque, et Trebevitch sont en ordre comme je les ai laissés.
Mohamed Nouidjem
