La mer.

J’étais à Belgrade pour prendre le visa de sortie du Kosovo à l’Ambassade de France. J’avais laissé toute la famille cachée dans un petit village près de Pristina. Des fascistes ont tué mon fils aîné, ils peuvent nous exterminer pour ne pas faire de la propagande à l’étranger. Après avoir pris tous nos biens.

J’étais suivi par des agents Serbes de la gare de Pristina jusqu’à l’ambassade de France à Belgrade. Malheureusement il fallait attendre quatre jours pour prendre le visa, pour que les fascistes ne découvrent pas les enfants en me suivant.

Je suis parti chez mon collègue le monténégrin, professeur de chimie, qui a de l’estime pour moi, qui est directeur d’une fabrique à Budva au bord de la mer Adriatique. Pero est un vrai ami. Je suis resté quatre jours chez lui en partageant mes malheurs avec toute sa famille pour m’encourager.


Le premier jour, Pero, avant d’aller travailler, m’a emmené au bord de la mer. J’avais trop d’angoisse pour regarder ce qui est beau, la mer me gênait avec le bruit des vagues. Je suis monté sur un grand rocher. J’ai commencé à regarder la beauté de la demi-sphère bleue que forme le ciel avec la surface de la mer, les vagues et leurs bruits, j’ai senti un petit soulagement. Le soir même j’ai téléphoné à mes enfants. J’ai entendu leurs voix. J’étais rassuré, tout va bien. J’ai dit : Inch’Allah on sera sauvés.

Le deuxième jour, sur le même rocher et à la même place. Je voyais mieux la belle vue, très loin, les muscles de mes yeux se décontractent, je vois encore plus loin jusqu’au bout de l’arc qui forme la courbure de l’eau autour de la terre. Dans la nature habituelle je n’ai pas cette occasion. Mon esprit est toujours auprès de mes enfants et de ma femme, s’ils n’ont pas de malheur, s’ils ont quelque chose à manger, est-ce que j’arriverai à les sauver ? Je me sens responsable d’eux.


Troisième jour. J’ai compris que le suicide dans la mer est très rare. A moins que ce soit accidentel. En tout cas, la mer est le meilleur psychologue. C’est une réadaptation progressive. Je regardais les oiseaux. Les petits bateaux tout près de moi et les grands bateaux parfois très loin de la rive. On dit toujours que la Méditerranée c’est le berceau de la civilisation. Mais moi, pour ce qui me concerne, c’est une cuvette des W.C de la civilisation, tous les malheurs sont là.

Pour me calmer encore je pensais aux phénomènes de la mer. Que la lumière est absorbée (photons) pas les molécules de l’eau à la surface de la mer. A certaine profondeur, pas de lumière, c’est la nuit éternelle. La pression varie avec la profondeur

(P = f x h ; P = pression ; f = densité de l’eau ;

h = profondeur). On a trouvé un morceau de bateau au fond de l’océan indien qui a été réduit dix fois plus petit et dix fois plus lourd.

Selon une idée populaire on entend la mer dans les coquillages.

Je me suis endormi pendant deux heures. Depuis quinze jours je n’avais pas dormi aussi longtemps. Je me suis bien reposé.

Le lendemain j’ai pris le train pour Belgrade.

J’ai pris mon visa et je suis parti à Pristina pour prendre mes enfants et ma femme.

Nous avons quitté le Kosovo à pied à travers les forêts et les montagnes.

Vers la France. Moi, ma femme et les enfants nous sommes très contents d’être venus en France à cause de sa culture et de la langue française.

Mohamed Nouidjem

Il faut travailler pour que les rêves deviennent réalité.Retour en ville.Un geste d'homme.J'ai laissé là bas.


J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

J'ai laissé là-bas.

Il faut travailler pour que les rêves soient réalité.

Retour en ville.