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« Embauché quand même », extrait de Travaux de G. Navel. Je ne croyais pas, quand j'avais lâché la mécanique une dizaine d'années plus tôt, que j'y reviendrais jamais. J'avais gardé le beau pied à coulisse", un « Roch » que j'avais acheté apprend, des équerres faites avec patience, un petit marteau d'outilleur, un pointeau.... Je ne savais pas que j'aurais encore besoin du métier que j'avais appris avec bonne volonté, mais par hasard, en me débrouillant pour cesser d'être manuvre quand j'avais quinze ans... J'étais un homme fait, je n'avais plus besoin de me durcir dans les tâches pénibles de plein air. Les tâches de mon métier, si je redevenais outilleur, me proposaient un meilleur emploi de mes facultés, plus heureux, plus absorbant.... Mes mains me donnaient confiance. Confiance exagérée : le métier exige non seulement la connaissance, mais l'habitude. Je ferais le vide. Je serais entièrement à mon ouvrage. Une lime imaginaire pesait dans mes doigts.... J'avais confiance.... Mais avant l'embauche, je devais faire un essai. Je m'aperçus vite que j'avais perdu en habileté. Un gars de mon âge vint me voir à l'étau. Il aurait pu m'ignorer, rester plongé dans son travail : il se dérangeait pour s'assurer que j'avais tout l'outillage nécessaire. Il m'apporta quelques limes et une ampoule électrique. Il revint pendant mon essai voir si mon ajustage s'annonçait bien. Rien que cela d'abord. C'était comme si tous ceux de l'usine m'accueillaient en me disant : « Tu es des nôtres. » J'étais de nouveau dans le monde du métal : beaucoup de fumée, peu d'air, avec cette impression pénible aux gens habitués à vivre au grand air. Les poumons souffrent, le regard cherche du ciel et bute aux carreaux bleus des toitures en lames de scie.... Le hall tonnait d'un bruit de bouteilles qu'on casse en nombre, et partout, avec des répétitions aiguës, sonores, rythmées. A midi, quand tout s'arrêtait, les oreilles s'en vidaient avec bien-être. J'avais nus douze heures à mon essai, dépassé le délai accordé. J'emballais mon outillage avec inquiétude, humilié de n'avoir pu mieux faire. Le délégué d'usine était venu me rassurer : l'usine manquait de main-d'uvre professionnelle, on pouvait m'occuper à un échelon plus simple de la production.... J'entrai à l'équipe des bielles et des coussinets comme ajusteur de fabrication. |
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Les motsPied à coulisse: instrument de mesure de précision.Pointeau: pointe d'acier utilisée pour marquer sur du métal un point de repère, l'emplacement d'un trou à forer.Un essai: ici, épreuve où on doit en un temps fixé, réussir un certain travail. En lames de scie: forme de toiture propreaux ateliers. Humilié: rabaissé à ses propres yeux. Bielle: bras de métal articulé transmettant un mouvement. Coussinet : bague de métal mou protégeant un axe de l'usure ou de réchauffement. Exercices oraux de recherche collectiveQu'est-ce qui donne à tout ce texte un caractère émouvant ?L'homme sera-t-il embauché ? Comment sera-t-il accueilli par ses futurs camarades? N'êtes-vous pas avec lui, anxieux de connaître le résultat de son essai ?
Les mots-clés: «Une confiance exagérée», «j'avais perdu en habileté», «tu es des nôtres !» «humilié de n'avoir pu mieux faire», «le monde du métal !» Quels sentiments soulignent-ils?Exercices individuels d'applicationQuelles sont les expressions qui nous disent la confiance en soi de cet ouvrier ? Dites ce qui a rendu son essai pénible et aussi ce qui l'a soutenu dans sa tentative.
Faites parler l'ouvrier: 1. On n'oublie pas le métier qu'on aime, mais on perd la main. 2. La minute de vérité (l'essai). Nécessité de l'entraînement, de l'habitude 3. La solidarité ouvrière, ... Embauché!
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